Chacun de nous a son histoire. Faite d'instants de bonheur et de deuils. De réussites et d'échecs. Ce parcours explique probablement beaucoup de choses. Mais...
Mais le passé ne dit pas comment changer le présent.
Il y a dans chaque vie humaine des histoires d'amour, de tendresse, de complicité. Quelques défaites ou déceptions amères. Parfois, des épisodes plus violents. Ou terriblement douloureux.
Tous ces évènements créent un parcours particulier. Ils font de chacun de nous la personne unique que nous sommes aujourd'hui. Ils ont façonné nos attentes autant que notre manière de chercher à y répondre. Pourtant...
Toute souffrance est invariablement actuelle. Ressentie ici. Maintenant. Il se peut qu'elle soit liée au souvenir lointain d'expériences malheureuses, mais... Même dans ce cas de figure, nous ne consultons un psychothérapeute qu'à l'instant précis où ce souvenir devient tellement envahissant qu'il compromet notre bien-être quotidien.
Évoquer notre passé pour le comprendre ou pour tenter de nous comprendre répond toutefois à un besoin humain naturel. Nous voulons tous que notre monde ait du sens, que notre parcours réponde à une logique, que nos états d'âmes s'expliquent. Alors? On s'allonge sur le divan pour raconter sa petite enfance? Pas si vite!
Les psychothérapeutes systémiciens ont identifié trois bonnes raisons pour résister à la tentation du récit de vie.
L'évocation d'un vécu traumatisant est parfois... oui, tout simplement traumatisant. Au lieu d'apaiser la personne qui consulte, un tel processus risque de raviver ses souvenirs. De rouvrir des plaies qu'elle a mis des années à cicatriser. De rendre les sentiments d'échec, de honte ou de perte plus aigus encore.
Une douleur expliquée risque d'apparaître comme justifiée. Du coup, elle peut sembler incontournable. Sachant qu'on ne peut pas ré-écrire le passé, il ne reste alors plus qu'à le subir...
Une démarche explicative n'a pas d'objectif clair en termes de mieux-être concret. Elle peut mener toujours plus loin dans l'exploration du passé... Sans jamais changer le présent.
Dans ma pratique de la thérapie brève, toute mon attention se porte sur la situation actuelle de la personne qui me consulte. Le but premier de notre démarche (voir encadré 1) ne sera pas de comprendre le pourquoi de ce présent. L'objectif sera de le changer favorablement pour ouvrir la voie à un avenir plus serein.
Les premières questions concerneront dès lors l'ensemble des comportements et sentiments qui posent problème. Là, tout de suite, dans la vie quotidienne. Dans les échanges avec un(e) partenaire, les enfants, les amis, les collègues.
L'analyse se poursuivra par l'examen de tout ce qu'une personne met déjà en oeuvre pour résoudre ses problèmes. Les stratégies qui échouent trop souvent. Celles qui l'aident parfois, mais trop peu, trop rarement ou au prix de trop grands efforts.
Et puis... il ne pleut pas tous les jours, même pas en Belgique. Il sera utile d'examiner s'il y a des éclaircies dans ce vécu problématique. Oh, pas pour minimiser la souffrance ni pour relativiser les ennuis de la personne! Mais pour savoir où, quand et comment elle réussit parfois à déjouer les pièges de la vie.
Enfin... Qu'est-ce qui nous permettra de dire, dans quelques semaines ou dans quelques mois, que nous avons atteint notre objectif? De quoi sera fait, très concrètement, le bien-être retrouvé?
Malgré l'orientation pragmatique d'une thérapie brève, j'aime y réserver une place pour l'histoire personnelle de la personne qui me consulte. Tous les souvenirs ne sont pas douloureux et certains peuvent fournir les clés de ressources précieuses et tout à fait actuelles. Considéré avec respect et bienveillance, le récit d'une vie peut nous mettre sur la voie de la solution.
Mais cette solution sera actuelle. Elle sera parfois paradoxale. Elle cherchera à changer le présent à très brève échéance. Elle créera de nouvelles opportunités et de nouvelles expériences.
Des expériences qui s'inscriront, à leur tour, dans une histoire humaine...
Faut-il associer la personne qui consulte à une définition claire de son but thérapeutique?
C'est déjà un premier pas vers son mieux-être, affirment des chercheurs canadiens qui ont étudié le concept et qui nous signalent que:
[...] les individus personnellement impliqués dans la poursuite de leurs buts révèlent un bien-être psychologique plus élevé et font preuve d’une meilleure santé mentale [...]
(Source: Revue québécoise de psychologie)